WHEN LANCE MEETS SHAUNA (R)

**Lance Donahue** Dim 16 Aoû - 18:56

« S-A-L-A-M-I. Six lettres, mot compte triple ! »
« … »
« Tu pourrais me féliciter, mauvaise perdante »
« … »
« Et voilà, Madame fait encore la tête parce qu’elle perd ! »
« … »
« Ilda, je t’ai connue plus bavarde »

Après vingt-sept minutes de mono-scrabble et de monologue, Lance ne semblait toujours pas avoir compris qu’il était réellement difficile – et pour tout dire impossible – à une plante verte de seize centimètres de se mêler aux festivités locales de son appartement. La solitude, c’était le terme générique que donnait le monde entier à cet état étrange dans lequel on se trouve et qui pousse un crétin no life à converser avec un croisement entre un tournesol nain et un cactus du Vietnam. Il soupira, ce qui était à la fois signe de son épuisement et de son ennui. Les trente-six degrés de l’extérieur lui soufflaient à l’oreille de rester dans la fraîcheur de son chez lui, afin d’éviter l’insolation. Mais malgré les conseils de santé de la météo, il se sentait pris au piège et était aussi actif qu’un rat mort. Mais quelle après-midi mortellement longue, c’était à peine croyable. Quatorze minutes plus tard – minutes durant lesquelles il sculpta une tête de troll dans une pêche jaune – il se décida à parcourir l’appartement en longueur pour joindre la chambre à coucher. Vêtu d’un simple short (allez savoir s’il portait des caleçons), il se laissa tomber comme un poids mort dans son lit. Il se tourna, se retourna, tomba hors du lit. Couché à plat ventre sur la moquette de la pièce, il agita fébrilement un avant-bras en signe de bonne santé et d’absence de douleur. Acte intéressant dans la mesure où il n’y avait personne d’humain dans ce lieu et que sa chère Ilda était dépourvue d’yeux.

Miracle, ô miracle. Le téléphone sonna. C’était lui : le Boss.

« Lance, ramène ton cul texan, j’ai à te parler »

***

Le beau Texan arriva à hauteur d’une superbe villa style européen, entourée de hauts sapins et d’une clôture en métal qui la protégeait des intrus. Il se stoppa devant la grille de l’entrée, et répondit avec charme à la voix féminine du haut-parleur. Prétextant être un ami de la famille (il n’allait pas s’annoncer comme le gigolo d’une nuit de la maîtresse de maison), il entra dans la propriété sans grand problème. Une heure plus tôt, le Boss lui avait proposé une liste de jeunes héritières (leur père étant de grands PDG, propriétaires de compagnie, etc.) où il avait pu choisir un nom selon ses préférences. Il s’était attardé sur une certaine Shauna, malgré la mise en garde de son supérieur. Il lui avait précisé que plus tôt dans la journée, un jeune homme était venu pour qu’on inscrite la dite-Shauna dans les listes. Il disait être l’un de ses amis et lui préparer une surprise d’anniversaire. Sauf que les gloussements et les rires crétins de l’individu avaient paru louches. Lance s’en manquait, ce soir Shauna passerait à la casserole – il espérait uniquement qu’elle n’ait pas soixante ans et un tour de taille aussi grand que la Chine. Il sortit du véhicule.

Il se stoppa devant la porte de la villa – une superbe porte en chêne avec une caméra surveillance en haut dans le coin droit – et misa sur ces dernières secondes avant de sonner pour se refaire une micro-beauté (oui il était déjà tellement beau au naturel, que se refaire une beauté était une question de deux ou trois secondes). Il passa une main dans ses cheveux, avant de déboutonner sa chemise. Il était à présent planter sur le pavillon, veste sur le bras droit, le bras gauche accoudé sur le bord de la porte, la chemise entièrement déboutonnée, la cravate nouée comme un bandeau autour de son front (ce qui donne l’air relativement intelligemment dans ces circonstances). Il sonna.

*Go Lance, t’es un Apollon, elle va craquer !
Y a en effet de fortes chances qu’elle soit heureuse de cette suprise
Bon la ferme crétin, elle ouvre la porte*

La porte s’ouvrit. Malheureusement. Lance plissa les yeux, se les frotta même. Était-ce l’obscurité de ce début de nuit qui lui troublait la vue ou la dite-Shauna prenait-elle des stéroïdes pour un futur championnat de lutte ? Non, il ne rêvait pas. Le Boss avait – comme toujours – eu raison. Devant lui ne se tenait pas la superbe créature de rêve dont il avait rêvé dans son trajet en voiture jusqu’ici. Non, il avait devant un plouc – un vrai – qui avait l’air complètement défoncé. Les yeux mi-clos, un vieux bonnet crade sur la tête, une clope à la main, il ressemblait à un clochard. Seules ses fringues et ses pompes semblaient coûter plus cher qu’un appartement normal. C’était qui ce blaireau ? Et là, il comprit malheureusement, reconnaissant la tête d’abruti du type devant lui. Il soupira, prenant conscience de son état de semi-nudité devant une créature de sexe masculin.

« Grand Dieu, dis-moi que t’as une frangine » se risqua-t-il tant bien que mal.

Mais non. La mystérieuse Shauna était en fait un mec. Merde.